Relations entre Activité Physique Adaptée et troubles anxieux/ attaque de panique (1/3)
Sandrine Morel, membre de la commission Psychiatrie, a travaillé dur pour produire un article qui présente l'état des connaissances sur les relations entre activité physique adaptée et troubles anxieux/ attaque de panique. Cet écrit sera diffusé en trois parties, la première permet de comprendre précisément ce qui se trouve derrière ces appellations.
Introduction
Les troubles anxieux constituent un important problème de santé publique. En effet ceux-ci font partie des pathologies psychiatriques les plus fréquentes de la population générale, avec une prévalence totale de 12 à 15%. Parmi les troubles anxieux, les troubles paniques sont les plus invalidants. Plusieurs théories ont vu le jour pour expliquer la cause de ces troubles et ont donné naissances à des thérapies psychologiques (comportementales) ou pharmacologiques (benzodiazépines). Néanmoins les traitements standards actuels sont limités dans leur efficacité, ce qui incite l'examen des solutions de rechange.
Au jour d’aujourd’hui l’évolution des idées et les résultats de nombreuses études montrent qu’il existe une synergie entre les modifications métaboliques périphériques et le système nerveux central. Depuis la fin des années 70 de nombreux chercheurs (e.g., Petruzzello et al en 1981) ont abordé le sujet des interactions possibles entre les troubles anxieux et l’activité physique. Les avantages de la pratique de l’activité physique sont reconnus tant du point de vue physiologique que du point de vue psychologique. Il existe maintenant des travaux qui démontrent que l’activité physique est associée à une importante réduction du niveau de dépression et d’anxiété chez les populations cliniques et non-cliniques. Les bénéfices de l’exercice physique peuvent s’expliquer par des processus physiologiques, biochimiques et psychologiques. L’activité physique pourrait être considérée comme une aide intéressante aux approches psychothérapeutiques des troubles paniques, dont les mécanismes et les effets restent encore à explorer.
L’anxiété, qu’est-ce que c’est ?
L'anxiété est quelquefois confondue avec l'angoisse. L'angoisse est caractérisée par un sentiment d'appréhension et de profonde inquiétude, alors que l'anxiété est considérée comme une crainte à propos de quelque chose. Plus précisément définie en 2005 par Palazzolo et Pinna [1] comme « une sensation de tension intérieure ou de danger imminent ». On peut, de ce fait, se sentir tendu, avant même que les problèmes ne soient survenus, ou avant même d’avoir repéré précisément ce que nous redoutons. C’est pourquoi les psychiatres appellent parfois l’anxiété une « peur sans objet » : on se sent inquiet, parfois, sans clairement savoir pourquoi. La propension à l'anxiété varie grandement entre les personnes. Elle devient pathologique lorsqu’elle est trop intense, inadapté, hors de proportion avec ses causes et/ou entraine un handicap social ou professionnel du fait de ses conséquences. Par exemple en raison d'une surestimation des dangers et des risques ou de la vulnérabilité personnelle ont abouti à un système d'alarme déréglé, déclenché trop tôt, trop intensément [2], on parle aussi de trouble de la régulation émotionnelle [3].
Le Trouble panique sans agoraphobie, qu’est-ce que c’est ?
La prévalence du trouble panique est estimée à 4,7% avec un âge moyen de début à 24 ans, il serait deux fois plus fréquent chez la femme [5]. Certaines études ont démontré l’implication de l’héritage génétique dans l’augmentation du risque de trouble panique chez les sujets apparentés (Goldstein. R et al 1997 [6]). Une méta analyse a estimé le risque de trouble panique à 10% pour les apparentés et 2,1% pour les sujets témoins [7]. On parle entre autre d’une variation génétique du gène MAOA [8]. Cependant la part des facteurs environnementaux ne permettent pas encore de faire la distinction avec la contribution génétique.
Selon le DSM-IV [9] , le trouble panique sans agoraphobie est caractérisé par à la fois des attaques de paniques récurrentes, dont au moins une s’est accompagnée pendant un mois (ou plus) de l’un (ou plus) des symptômes suivants : crainte persistante d’avoir d’autres attaques de panique, préoccupation à propos des implications possibles de l’attaque ou bien de ses conséquences (perdre le contrôle, peur de devenir fou) ou bien changement de comportement important en relation avec les attaques.
L’Attaque de panique (AP) est période bien délimitée de crainte ou de malaise intense. Les symptômes les plus fréquemment rapportes sont les palpitations cardiaques, les étourdissements, la transpiration, les tremblements, la dyspnée (sensation d'étouffement) et la peur de perdre le contrôle [10]. Ils peuvent varier d'un individu ou d'une attaque à l'autre [11]. Ces symptômes surviennent de façon brutale et ont atteint leur paroxysme en 10 minutes (DSM-IV). La durée totale d’une attaque de panique est généralement de 20 à 30 mn, n’excédant rarement une heure, s’achevant progressivement, par un sentiment de soulagement, d’épuisement intense, de vulnérabilité et d’incompréhension [4].
Dans cette situation où l’anxiété affecte de façon durable les comportements, les pensées et les perceptions physiques nous pourrons parler de trouble anxieux. Les toubles anxieux font partie des troubles psychiatriques les plus fréquent en popoulation générale, avec une prévalence totale de 12 à 15% [4]. Le type de trouble anxieux est défini surtout pas l’objet de la peur et par les comportements qui en découlent. Dans cet article nous aborderons le trouble panique seul et le trouble panique avec agoraphobie.
La symptomatologie de l’AP est souvent hétérogène mais assez stéréotypée d’un patient à l’autre. Les manifestations peuvent être décrites dans trois registres : somatique, psychiatrique et comportementale (cf figure 1). Le symptôme fondamental est l’anxiété anticipatoire qui est souvent décrit par la « peur d’avoir peur ». Ainsi chez les personnes atteintes de trouble panique la crainte principale concerne le risque de survenue d’une crise. Lorsque les symptômes du TP poussent le sujet à éviter les situations d'où il pourrait être difficile de s'enfuir ou dans lesquelles il pourrait ne pas trouver de secours en cas d'attaque de panique, on posera le diagnostic d'agoraphobie.
Le Trouble panique avec agoraphobie, qu’est-ce que c’est ?
Selon l’enquête ECA, la prévalence de l’agoraphobie secondaire au Trouble Panique a été estimée à 1/3 des cas [12]. A l’inverse, l'agoraphobie peut survenir de façon isolée, sans attaque de panique, cependant 95% des agoraphobes présentent un trouble panique. L’enchaînement chronologique des troubles entre AP et agoraphobie ne fait cependant pas l’objet d’un consensus. Pour certains auteurs dont Klein et al. les AP entraînent des conduites d’évitements voir une agoraphobie. Pour d’autres auteurs dont Marks & Angs, la phobie est en revanche primaire et elle se complique secondairement par des AP [13]. Le Trouble panique est ainsi caractérisé par la présence (TPA) ou l’absence (TPSA) d’une agoraphobie.
Parfaitement conscient du caractère déplacé voire ridicule de ses troubles et craintes, le patient TPA et TPSA est souvent partagé entre la dépendance et le renoncement. Au maximum, l’évitement s’impose de façon drastique et généralisée. De tels comportements ont tendance à envahir tous les domaines de la vie quotidienne provoquant parfois de graves difficultés relationnelles ou familiales. Les conséquences de ce trouble peuvent être extrêmement invalidantes, les patients isolés, non diagnostiqués, risquant de finir cloîtrés à leur domicile, incapables de sortir de chez eux.
Modalités évolutives [14]
Le TP avec ou sans agoraphobie présente le plus souvent une évolution chronique, sur plusieurs années. En l'absence de traitement, les études [15 - 17], pour des périodes allant de un à vingt ans montrent :
- 10 % d'évolution favorable, c'est-à-dire l'absence de nouvelles attaques de panique.
- Pour 30 %, on retrouve une amélioration de la symptomatologie, sans disparition complète des attaques de panique, mais sans altération de la qualité de vie ;
- 30 % vont conserver un trouble panique-agoraphobie avec une altération de la qualité de vie, mais sans autre complication ;
- 30 % auront une évolution marquée par des complications médicales ou psychiatriques sévères, avec une altération marquée de leur qualité de vie (le risque suicidaire et dépressif est abordé dans la partie comorbidité).
Concernant le traitement, l'efficacité sur la suppression des AP varie entre 70 et 90 %, mais la proportion de rechute est importante à l'arrêt du traitement (entre 20 et 80 %) [18 - 19]. Une étude de suivi à long terme (3,5 ans en moyenne) retrouve une proportion de sujets guéris ou très améliorés d'environ 40 % [20]. Il a été montré que les différentes thérapeutiques ont diminué sensiblement les évolutions les plus défavorables sans que le taux de guérison ne soit modifié.
Pour terminer, une vidéo pour illustrer