Promotion de l'activité physique adaptée chez les dialysés
Le champs de l'insuffisance rénale chronique et de la dialyse s'ouvre aux enseignants APA. Voilà quelques temps, nous annoncions dans les actualités, la publication d'une revue de synthèse sur le sujet. Le Dr Anne Kolko, co-auteur de ce travail a accepté de nous en faire une synthèse accessible afin que le message puisse être plus largement diffusé aux enseignants APA. Merci à elle.
L’activité physique (AP) régulière est recommandée au cours de maladies chroniques telles que la maladie rénale chronique (MRC) et ce quel que soit l’âge. Néanmoins la promotion de l’AP est bien moins fréquente que la prise en charge d’autres facteurs de risque cardio vasculaires et n’est pas encore intégrée en routine pour les patients souffrant de MRC. Dans une enquête réalisée auprès de 505 néphrologues Johansen a souligné que si 97% estiment que l’AP est bénéfique pour les patients dialysés, seulement 38% l’évaluent et 5% ont mis en place un programme, essentiellement par manque de temps et de connaissance dans ce domaine, mais aussi par crainte d’opposition du patient ou de risques éventuels. Plusieurs études observationnelles ont pourtant montré que d’une part la sédentarité était associée à une surmortalité chez les patients dialysés chroniques, que l’évaluation soit faite par des questionnaires ou un relevé du nombre de pas et que d’autre part les patients dialysés étaient sédentaires (dans une enquête réalisée en 2013 auprès de 1163 patients en France ayant porté un podomètre 7 jours consécutifs, on relevait un nombre de 3688 pas/j avec 64% de patients sédentaires). Il est donc nécessaire d’inclure la prise en charge de l’AP des patients dialysés en routine.
La première étape devrait être une évaluation systématique de l’AP chez tout patient dialysé avec les outils utilisés dans d’autres pathologies et en particulier en gériatrie compte tenu de l’âge médian de plus de 70 ans chez ces patients en France (données du registre REIN). Il n’est pas nécessaire ni raisonnable de proposer une épreuve d’effort à ces patients et le test de marche ou la vitesse de marche trouvent bien leur place dans ce contexte. Différents programmes peuvent être proposés aux patients dialysés, exercice aérobie, renforcement musculaire , ou idéalement combinaison des deux. Ces programmes peuvent être menés soit au cours de la séance de dialyse, à raison par exemple de 3 séances de 30 mn de pédalage par semaine à chaque séance de dialyse, soit en dehors des séances mais l’accès aux centres de réhabilitation n’est pas usuel pour les dialysés contrairement à ce qui existe en pathologie cardiovasculaire, soit à domicile supervisés par un Enseignant APA. Il est possible de combiner ces modalités. L’exercice intradialytique est réalisable avec un ergocycle installé au lit du patient et offre l’avantage certain d’utiliser le temps d’immobilisation de la séance de dialyse qui participe au déconditionnement chez ces patients et de faciliter l’adhésion du patient, en particulier chez les patients âgés, polypathologiques et déconditionnés. L’intensité de l’exercice doit bien sur être adaptée aux capacités du patient.
Les études réalisées en dialyse ont montré des résultats positifs en ce qui concerne les capacités fonctionnelles cardiaques et musculaires, mais aussi amélioration de la qualité de vie qui est très altérée en dialyse et diminution des scores de dépression. On a également noté une amélioration du contrôle tensionnel, une diminution de l’insulinorésistance et une amélioration de l’état nutritionnel si l’exercice est combiné à une prise en charge diététique. L’effet bénéfique de l’AP a également été démontré chez les patients en attente de transplantation rénale sur leur devenir après la transplantation. Une récente méta-analyse n’a relevé aucun effet indésirable grave.
Il reste un certain nombre de freins à lever pour promouvoir l’AP en dialyse et en particulier une meilleure information des équipes soignantes. Idéalement des enseignants en APA devraient intervenir dans les centres de dialyse pour évaluer le niveau d’AP et participer à la mise en place de programmes adaptés.
Ref. Kolko Labadens A, Lasseur C, Labat T, Trolonge S, Chauveau P. Activité physique chez les patients dialysés : comment et pourquoi l’évaluer et mettre en place un programme ? Nephrol Ther 2014;10:151–8.